En orbite ou en avant?

Hier soir, j’ai fait la rencontre de Josh, un ancien toxicomane. Il a failli y laisser sa peau, l’abus d’alcool ayant passé proche avoir raison de son foie. Ce qui l’a sauvé, c’est le troublant constat que boire ne lui procurait aucun bien. Il le faisait parce que l’effet obtenu était pour lui prévisible. Il est plus facile de reproduire ce qu’on connaît déjà, même si c’est nocif pour nous, que penser, chercher à améliorer son sort.

Aujourd’hui, je me demande si la situation de Josh est si unique que ça, si d’autres toxicomanes ne sont pas comme lui, à rechercher la prévisibilité au détriment de l’innovation, à favoriser le pilote automatique au détriment de la conscience, le statu quo même si la santé en pâtit. Et ce n’est pas que l’alcool et les drogues, non, possiblement tout peut devenir sujet à la toxicomanie! Combien de bureaucrates ont-il protesté contre l’automatisation bousculant leurs façons de faire archaïques mais prévisibles et ne demandant pas de penser? Combien de médecins ont-il résisté presque comme si leur vie était en péril contre le remplacement de la télécopie par le courrier électronique? Combien de membres du clergé ont-ils protesté contre l’avortement, le mariage des prêtes, l’homosexualité, parce que ce n’est pas comme ça que ça fonctionnait avant? Il est si facile de s’accrocher et continuer à miser, toujours et toujours, en se disant que cette fois, ce sera la bonne, que nous allons gagner. Pourquoi cette fois serait-elle la bonne et pas la précédente? Qui nous dit que ce serait cette fois, la bonne, ou s’il ne faudra pas 50 autres essais additionnels? S’il en fallait 500, des essais, 5000 même, disposerais-tu des ressources (argent, temps, énergie) pour effectuer tous ces essais? Penser, réfléchir à une meilleure façon d’utiliser les ressources, ce n’est pas simple, c’est plus difficile que prendre la bouteille, l’ouvrir et boire jusqu’à l’oubli, ou jeter sur cette table de poker qu’on est si habitué de regarder tout ce pour quoi nous avons travaillé toute notre vie. Mais à quoi bon?

Il faut cesser de graviter sans fin autour de ce trou noir, même si dans le même système solaire il y a cette petite étoile naine dispensatrice d’une douce chaleur, pas assez pour vibrer mais juste assez pour survivre, soleil blafard connu et confortable. Il est tentant de croire que si cette étoile était la vôtre, séparée de son trou noir, elle brillerait plus, elle brillerait mieux, mais tous vos essais pour la faire vôtre ont été vains, sans réaction. Pourquoi cette fois-ci ce serait la bonne? Combien d’énergie vas-tu gaspiller à essayer de séparer cette étoile-là du trou noir? Et si un jour, tu réussissais, pour constater que l’étoile avait besoin de son trou noir pour se réguler et va, entre tes mains non expertes, exploser? Ne pouvons-nous pas enclencher les propulseurs et nous éloigner de ce statu quo, afin que le trou noir adjacent à la petite étoile douce cesse de nous aspirer toute cette énergie qu’on pourrait utiliser mieux que la jeter dans ce puits sans fond?

Ne pourrions-nous pas enfin ouvrir les rideaux de cette chambre toujours noire et là, surprise, voir le soleil qui était là depuis toujours et qui éclaire bien mieux que ces petites bougies? Ne pourrions-nous une bonne fois pour toutes pousser la porte de ce petit salon de bronzage miteux où nous avons passé toute notre vie, pour embrasser la vastitude de la plage qu’il y a juste à côté, et enfin sauter dans la mer, pas juste se bombarder la peau d’UV cancérigènes?

Moi je dis qu’il est temps de prendre les armes, déclarer la guerre au statu quo, laisser les trous noirs derrière pour explorer le firmament, laisser le salon de bronzage derrière pour sauter dans la mer et crier de joie sous l’effet de ses vagues purificatrices.

Un problème subsiste. L’énergie qui permet de s’extirper de l’attraction d’un trou noir, elle est également assez forte pour nous y ramener. Un noyau d’hyper-exponentielle sait nous propulser vers un autre système solaire, aux confins de l’espace, mais il peut aussi, si on le veut, nous ramener à notre point de départ, peu importe ce qu’il est. Si on ne trouve pas quelque chose à aller chercher là-bas, au loin, je crois qu’on reviendra à notre point de départ, retombant dans les mécanismes du passé. C’est seulement avec un objectif que nous pourrons cesser d’orbiter et enfin aller en ligne droite.

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